Augustus Trombone, (0 AG, -14 AG) aussi appelé "amer poète" par ses amis, on se demande bien pourquoi, était un petit cuisinier du prince Poucrasse qui s'est distingué par ses plats sonores.
Il avait imaginé en effet un dispositif de soufflets, de soupapes et d'anches qui se libéraient lorsque le gâteau, le gigot, les poivrons, les jambonneaux et autres pâtés étaient amenés sur la table, fête des yeux et des oreilles. Ensuite, morceaux fins découpés selon des rites compliqués, ils provoquaient toutes sortes de petits sons percussifs, et de tendres mélodies annonciatrices de plaisirs nouveaux. Trombone eut ensuite l'idée de travailler sur le bruit de la mastication, sachant que tous les aliments résistaient différemment à la bouche, afin d'obtenir diverses textures sonores. Celles-ci, habilement mélangées, formaient un petit concert domestique des plus charmant, qui soulageait les convives d'entretenir une conversation laborieuse avec le Poucrasse, sinistre tyran sénile. Trombone s'est ensuite ingénié à modifier la densité et le contenu de ses plats, afin d'obtenir une homogénéité parfaite dans les réactions de l'estomac.
Hormis le progrès social (on sait comme il est désagréable d'avoir des gargouillement d'estomac seul dans une assemblée, alors qu'à plusieurs c'est une source infinie de bonne humeur), le son produit par ces diverses réactions digestives étaient à la hauteur du musicien exquis qu'était notre cuisinier Trombone : un ravissement. Trombone n'a d'ailleurs pas hésité à appeler ses inventions culinaires sonates, quadrille, chœur final, variations à bouche, adagio des rondeurs, etc. Même l'austère Repher a participé à ces libations, qui étaient des plus courues, et semble-t'il n'était pas le dernier à se goinfrer.
Il semble que Trombone ait étudié des étapes ultérieures dans le parcours des aliments, mais selon ses propres dires, elles étaient difficiles à mettre en place, et n'ont sans doute connu qu'une expérimentation hon-teuse dans des lieux de solitude.